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Théisme épuré[1]quoi qu’il en soit de l’autre vie, ou des récompenses & des

  1. Si dès ce Monde la Vertu porte avec elle sa récompense & le Vice, son châtiment ; quel motif d’espérance pour Le Théiste ? N’aura-t-il pas raison de croire que l’Etre suprême qui exerce dans cette vie, une justice distributive entre les bons & les méchans, n’abandonnera pas cette voye consolante dans l’autre ? Ne pourra-t’il pas regarder les biens passagers dont il jouit comme des arrhes du bonheur éternel qui l’attend ? Car si la Vertu a des avantages actuels, toutefois il en coute pour être vertueux : si l’état de l’honnéte-homme ici bas n’est pas déplorable, il s’en faut bien que sa félicité soit complette : il lui reste toujours des desirs ; & ces desirs, preuves incontestables de l’insuffisance de sa récompense actuelle, ne conspirent-ils pas avec la révélation qu’il est prêt d’admettre, pour l’assurer d’une vie à venir. Mais si l’on supposoit au contraire que l’honnête-homme ne peut être que malheureux en ce Monde & que la félicité temporelle est incompatible avec la Vertu ; l’œconomie singuliére qui régneroit dans l’Univers, ne le porteroit-elle pas à se méfier de l’ordre qui régnera dans l’autre vie ? Décrier la Vertu, n’est-ce donc pas prêter main-forte à l’Athéisme ? Amplifier les désordres apparens dans la Nature, n’est-ce pas ébranler l’existence d’un Dieu, sans fortifier la croyance d’une vie à venir ? Un fait vrai, c’est que ceux qui ont la meilleure opinion des avantages de la