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jets extérieurs, mais ſeulement leurs propres perceptions paſſives. Ainſi l’imagination ſera ſeulement conforme à la perception paſſive des ſens, laquelle paſſion eſt différente de l’objet extérieur. Car le miel n’eſt pas la meſme choſe que la perception de douceur que j’ai en mangeant du miel : & l’abſinthe eſt toute différente de la perception d’amertume que ce breuvage me cauſe. Or ſi la perception paſſive eſt différente de l’objet extérieur, l’imagination frappée ne ſera pas une repréſentation de cet objet, mais de quelque choſe qui en ſera toute différente. Si donc l’entendement juge ſur cette repréſentation, il jugera mal, & non conformément à l’objet réel qui eſt préſent aux ſens. C’eſt pourquoy il eſt abſurde de dire que l’on puiſſe juger des objets de dehors, ſur le rapport de l’évidence qui eſt l’impreſſion de l’ame. Car d’où eſt-ce que l’entendement ſaura ſi les perceptions paſſives des ſens ſont ſemblables aux choſes qui s’aperçoivent par les ſens, n’ayant par luy-meſme aucun commerce avec les choſes de dehors, & les ſens ne luy repréſentant point la nature de ces choſes, mais ſeulement leurs propres perceptions à eux-meſmes, comme on le peut voir par ce que nous avons dit en parlant des moyens de l’Époque, au quatrième moyen ? Car comme celuy qui ne connaît point Socrate, mais qui a vu ſon portrait, ne ſçait