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pourra-t-on admettre cet animal, pour juger que l’homme eſt le juge de la vérité ? Car ſi cet animal juge, ſans que ſon jugement ait été reconnu & jugé comme vrai, on ne le croira pas : que ſi ſon jugement eſt approuvé, on demandera par qui. S’il eſt approuvé par l’animal luy-meſme, c’eſt la meſme abſurdité que ci-deſſus ; & s’il eſt approuvé par un homme, voilà le Diallèle, ou le cercle vicyeux. Que ſi le jugement de cet animal eſt approuvé par quelque autre que par luy meſme, & que par l’homme, il faudra chercher un juge qui décide de la validité de ce jugement, & ainſi de ſuite à l’infini. Ainſi nous ne pourrons jamais dire, que les choſes doivent eſtre jugées par l’homme.

Accordons néanmoins que l’on diſe & que l’on croie que les choſes doivent eſtre jugées par l’homme. Comme il y a une grande diverſité entre les hommes, nous demanderons d’abord que les dogmatiques conviennent entre eux, s’il faut ſuivre le ſentiment de cet homme-ci, ou de celuy-là, avant que d’exiger que nous ſuivions auſſi le ſentiment de cet homme. Mais s’il eſt vrai, que tant que l’eau coulera, tant que les arbres porteront des feuilles, ils diſputeront pour ſavoir qui d’entre eux doit eſtre le juge des choſes ; comment peuvent-ils nous preſſer avec tant de hardieſſe de ſuivre le ſentiment de qui que ce ſoyt ?

S’ils diſent qu’il faut ajouter foi au ſage.