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clairement encore à l’œuvre les inclinations, les intérêts, les travers d’où est sorti, non le régime lui-même, mais le système qui lui a donné sa forme dogmatique. Elle en dénonce, elle en précise le caractère artificiel et spéculatif. Or, par ses racines au moins, elle touche aux couches littéraires les plus primitives ; parmi les Hymnes védiques, plusieurs sont, à n’en pas douter, contemporains de l’époque où elle-même s’élaborait sous la main des prêtres.

Un de ces hymnes passe pour le document le plus ancien qui atteste explicitement dans l’Inde l’existence des castes. C’est celui qui décrit comment l’univers sort tout entier de la substance du Mâle primitif, Purusha. Le texte déclare que « le Brahmane était sa bouche, le Râjanya (Kshatriya) ses bras, le Vaiçya ses cuisses », que « de ses pieds naquit le Çûdra ». De l’aveu de tous, ce morceau est parmi les plus récens de la collection vénérable où il a pris rang. Il a pourtant bénéficié en quelque mesure du prestige qui s’attache à l’ensemble. On s’est d’autre part, pour apprécier, pour commenter le témoignage, inspiré de cette idée préconçue que l’existence des castes devait se manifester sous la forme des quatre castes du système développé ; rien à mon sens de plus fragile.