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dès cette époque, la légende, dans son ensemble, était fixée[1].

À vrai dire, ce n’est pas tant l’antiquité de nos traditions qui a besoin de preuve. Tout le monde l’admet, en un sens ; plusieurs mêmes y voient des souvenirs authentiques, contemporains par conséquent de Çâkyamuni. Ce qu’il importe de montrer, c’est que, des cette époque, et aussi haut qu’il nous soit possible de remonter, ils existaient intégralement, ils existaient sous une forme ou identique ou parfaitement équivalente aux versions qui vont servir de base à notre examen.

Au fond l’unanimité n’est pas moins complète dans les caractères essentiels des traditions que dans leur structure générale. Sans doute, la couleur sous laquelle elles sont présentées peut varier d’une source à l’autre ; il peut y avoir des écarts dans ces développements dont les buddhistes sont prodigues. De pareilles différences ne touchent pas à l’inspiration fondamentale des récits.

  1. Les buddhisles croient avoir conservé la date exacte de la mort de Çâkyamuni. Leurs divergences considérables rendent à priori cette prétention assez suspecte. Mais je n’ai pas à entrer ici dans les controverses que la question a soulevées, ni même à énumérer toutes les tentatives qui ont été faites pour arriver à une correction certaine de cette chronologie. En tous cas, je doute fort, comme M. Oldenderg (Zeitschr. der Deutsch. Morg. Gesellsch., XXXV, 473) que les inscriptions de Sahasaram et de Rupnath aient tranché la question. Heureusement, il est assez indifférent pour les vues que j’ai à exposer de savoir si le fondateur du buddhisme est ou non mort en 477. Certes, cent cinquante ou deux cents ans suffiraient, et au delà, pour expliquer la constitution de sa légende, dans les conditions que fera ressortir cette étude. Quoi qu’il en puisse être, les données empruntées par des inductions légitimes au fond même des traditions ne peuvent manquer de garder leur prix. En ce qui nous concerne, elles se résument dans cette conclusion que la légende mythologique du Buddha était, dans ses traits essentiels, définitivement fixée, dès l’époque où remontent les parties narratives réputées les plus archaïques parmi les écrits canoniques qui nous sont connus.