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bâtie que la plupart des petites villes de France. Dans les environs, et aux portes mêmes de la ville, il y a plusieurs sites pittoresques et un peu sauvages.

L’ermitage dit la Madeleine ne mérite pas sa célébrité. Il est occupé par une espèce de fou qui est devenu à moitié saint, ne trouvant plus d’autre sottise à faire. Cet homme n’a jamais eu l’esprit de son état ; dans le gouvernement il ne fut pas magistrat, et dans l’ermitage il ne fut pas ermite ; il portait le cilice sous l’habit d’officier, et le pantalon de hussard sous la robe du désert.

Le roc a été bien choisi par le fondateur. Il est sec et dans une bonne exposition ; la persévérance des deux hommes qui l’ont percé seuls est sûrement très-remarquable. Mais cet ermitage, que tous les curieux visitent, est du nombre des choses qu’il est inutile d’aller voir, et dont on a une idée suffisante quand on en sait les dimensions.

Je n’ai rien à vous dire des habitants, parce que je n’ai pas le talent de connaître un peuple pour avoir parlé quelques moments à deux ou trois personnes : la nature ne m’a point fait voyageur. J’aperçois seulement quelque chose d’antique dans les habitudes ; le vieux caractère ne s’y perd qu’avec lenteur. Les hommes et les lieux ont encore la physionomie helvétique. Les voyageurs y viennent peu : il n’y a point de lacs ou de glaciers considérables, point de monuments. Cependant ceux qui ne vont que dans la partie occidentale de la Suisse devraient au moins traverser le canton de Fribourg au pied de ses montagnes ; les terres basses de Genève, de Morges, d’Yverdun, de Nidau, d’Anet, ne sont point suisses ; elles ressemblent à celles des autres peuples.