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caractéristique et dont les téguments étaient empâtés d’une bouffissure spéciale ; on les aurait reconnus entre mille ; il suffisait de les avoir vus une fois… »

« Pour les questions qui se rattachent à l’histoire pathologique de la lèpre, la contagion encore si controversée..... l’impuissance presque absolue des moyens thérapeutiques contre cette bizarre maladie, etc., toutes ces notions ont été puisées, vous devez le penser, aux bonnes sources. J’ai eu, du reste, toujours beaucoup de goût pour tout ce qui touche à la médecine. Étant encore sur les bancs du collège, tandis que je faisais une année de philosophie à Douai, j’allais suivre le plus souvent que cela m’était possible les cours de médecine à l’École secondaire de Lille qui était voisine. C’est à l’hôpital de cette ville que j’ai vu pour la première fois des sujets atteints de fièvre typhoïde. J’en ai revu ensuite au Val-de-Grâce, puis en Afrique et plus tard à Besançon. Je n’ai donc pas décrit, de chic, l’observation de fièvre typhoïde qui se trouve tout au long rapportée dans Madame André. Je connaissais d’autant mieux cette affection que mon père avait pris pour sujet de thèse de doctorat la fièvre typhoïde. Aussi me suis-je attaché, et je crois y avoir réussi, à faire une description avant tout exacte. Si vous lisez ce chapitre de Madame André vous pourrez voir que j’ai d’abord relevé les symptômes du début :

» Les frissons, l’élévation de température, la langue tuméfiée, le gargouillement de la fosse iliaque droite se manifestant à la palpation ; puis la céphalalgie, qui vous étreint comme un étau ou vous taraude comme une vrille et qui vous met vraiment du plomb dans la tête ; je n’ai pas oublié les tranchées intestinales, ni le saignement de nez si fréquent au cours de l’affection dans la première période. Mon malade a eu du délire, puis après le premier septennaire, je n’ai pas manqué de signaler les petites taches rosées lenticulaires dont sa poitrine était mouchetée ; aux taches ont succédé les cloques qui s’écrasent sous le doigt en laissant sur la peau une goutte de sueur ; ce que vous, médecins appelez les sudamina, n’est-ce pas ? Je crois ne m’être pas trop éloigné de la réalité dans cette description : au moins ai-je fait