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LE NAIN NOIR

descendre jusqu’à me justifier. Vous connaissez l’honneur inflexible de notre cousin Mareschal ; faites attention à ce que je vais lui écrire, et vous jugerez par sa réponse si les périls qui nous menacent sont moins grands que je ne vous les ai représentés.

Il écrivit quelques lignes, et présenta son billet à Isabelle, qui lut :


« Mon cher cousin, — J’ai trouvé ma fille, comme je m’y attendais, désespérée d’avoir à contracter une union avec sir Frédéric d’une manière si subite. Elle ne conçoit pas même le péril dans lequel nous nous trouvons, employez toute votre influence sur sir Frédéric pour l’engager à modifier ses exigences. Je n’ai ni le pouvoir ni même la volonté d’engager ma fille à une démarche dont la précipitation est contraire à toutes les règles des convenances et de la délicatesse. R.V. »


Dans le trouble qui l’agitait, Isabelle comprit à peine le sens de ce qu’elle venait de lire, et ne remarqua pas qu’au lieu d’appuyer sur la répugnance que lui causait ce mariage, son père ne parlait que du délai trop court qu’on lui accordait pour s’y décider.

Ellieslaw tira le cordon d’une sonnette, et remit la lettre à un domestique, avec ordre de lui rapporter sur-le-champ la réponse de M. Mareschal. Le domestique revint, porteur d’un billet ainsi conçu :


« Mon cher cousin, — Je n’avais pas attendu votre lettre pour faire à sir Frédéric les objections dont vous me parlez. Je viens de renouveler mes instances, et je l’ai trouvé inébranlable. Je suis fâché qu’on presse ma belle cousine de renoncer d’une manière si subite aux droits de sa virginité. Sir Frédéric consent pourtant à partir avec moi, aussitôt que la cérémonie sera terminée ; et, comme nous nous mettons demain en campagne, et que nous courons la chance d’y attraper quelques bons horions, il est possible qu’Isabelle se trouve lady Langley à très bon marché. — Du reste, si elle peut se déterminer à ce mariage, ce n’est pas l’instant d’écouter des scrupules de délicatesse. Il faut qu’elle saute à pieds joints par-dessus les convenances, et qu’elle se marie à la hâte, ou bien nous nous en repentirons. R.M.


« P.S. N’oubliez pas de dire à Isabelle que je me couperai la gorge avec son chevalier, plutôt que de la voir l’épouser contre son gré. »


À la lecture de cet écrit, le papier s’échappa des mains d’Isa-