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LES PURITAINS D’ÉCOSSE

que lui donnerait son mariage, lady Evandale trouverait les moyens d’assurer à sa digne aïeule une vieillesse tranquille.

Cet argument, auquel Edith ne s’attendait pas, ne lui laissa rien à répliquer. Elle fut forcée de reconnaître que la conduite d’Evandale était inspirée par la délicatesse autant que par la générosité.

— Et cependant, Milord, telle est la bizarrerie de mon imagination, que mon cœur (ajouta-t-elle en pleurant), lorsqu’il se reporte vers le passé, ne peut, sans un pressentiment sinistre, penser à remplir si subitement mes engagements.

— Vous savez, ma chère Edith, que le résultat de toutes nos recherches, a été de nous convaincre que nos regrets étaient superflus.

— Il n’est que trop vrai ! dit-elle avec un profond soupir.

À l’instant même, Edith entendit son soupir répété dans l’appartement voisin. Elle tressaillit, et se rassura à peine quand lord Evandale lui eut fait observer que ce qu’elle avait cru entendre ne pouvait être que l’écho de sa propre voix.

— Tout ce que j’entends se convertit en sinistre augure.

Lord Evandale s’efforça de nouveau de la déterminer à une mesure qui, quoique en apparence un peu précipitée, était le seul moyen qui pût la mettre, elle et son aïeule, à l’abri des événements futurs. Enfin, n’ayant à opposer à ses sollicitations qu’une répugnance sans motif raisonnable, elle ne trouva plus à lui alléguer que l’impossibilité que la cérémonie eût lieu dans un si court délai. Mais lord Evandale avait tout prévu. Il se hâta de lui expliquer que l’ancien chapelain de son régiment l’avait suivi avec un fidèle domestique, et que cet homme servirait de témoin, avec lady Emilie, Cuddy Headrigg et sa femme. Il ajouta qu’il avait choisi Fairy-Knowe pour la célébration du mariage.

Ayant ainsi victorieusement répondu au dernier argument d’Edith, il alla prier sa sœur de retourner auprès de son amie, puis courut prévenir les personnes dont la présence était nécessaire.

Lady Emilie trouva Edith fondant en larmes, et elle en chercha vainement la cause ; car elle était du nombre de ces demoiselles qui ne voient rien de terrible ni d’effrayant dans le mariage ; elle employa tous les arguments obligés en faveur du lien conjugal ; mais quand elle vit que les pleurs continuaient à couler, sa fierté s’offensa, et l’amitié fit place au dépit.

— Miss Bellenden, dit-elle, je ne comprends rien à votre conduite. Quand vous avez consenti à devenir la fiancée de mon frère, vous avez fait la promesse de l’épouser ; et maintenant qu’il s’agit