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LES PURITAINS D’ÉCOSSE

ment le changement qui s’opéra sur son visage. L’exécuteur releva son marteau, et se tint prêt à frapper un second coup.

— Voulez-vous dire, répéta le duc, où vous avez laissé Balfour de Burley la dernière fois que vous l’avez vu ?

— J’ai répondu, dit Macbriar avec résolution. — Et le second coup fut frappé, puis le troisième, puis le quatrième ; mais au cinquième, le malheureux poussa un cri d’angoisse.

Le sang de Morton lui bouillait dans les veines pendant cette scène barbare ; il ne put en soutenir plus longtemps la vue, et quoique sans armes, il allait s’élancer au secours de Macbriar, lorsque Claverhouse, qui avait remarqué son émotion, le retint en lui mettant une main sur la bouche et en lui disant tout bas : — Pour l’amour de Dieu, songez où vous êtes !

Heureusement pour lui, ce mouvement échappa aux regards des autres conseillers, dont l’attention était fixée sur le patient.

— Il est évanoui, dit le chirurgien. Milords, la nature humaine n’en peut endurer davantage.

— Donnez-lui relâche, dit le duc ; et se tournant vers Dalzell, il ajouta : — Finissons-en avec lui.

On fit respirer des essences au malheureux captif, et lorsqu’il eut repris ses sens le duc prononça sa sentence de mort, comme traître, fait prisonnier les armes à la main, et le condamna à être conduit au lieu ordinaire des exécutions, pour y être pendu ; il ordonna ensuite la confiscation de tous ses biens au profit de la couronne.

— Doomster, lisez la sentence.

L’office de doomster ou justicier, qui consistait à répéter aux condamnés la sentence des juges, était alors exercé en Écosse par l’exécuteur des hautes-œuvres. Cette lecture produisait dans leur esprit un nouveau degré d’horreur, en leur rappelant que celui qui l’articulait allait en faire l’application.

Macbriar n’avait pu entendre que très imparfaitement le jugement prononcé par le lord président du conseil, mais quand le bourreau prit la parole, il était complètement revenu à la vie. Il répondit :

— Milords, je vous remercie. Vous m’avez accordé la seule grâce que j’eusse voulu recevoir de vous, en envoyant à une si prompte mort ce corps torturé et épuisé par votre cruauté ! Peu m’importe en effet de périr en prison ou à la potence. Vous allez me fournir l’occasion de montrer au grand jour ce qu’un chrétien peut souffrir pour la bonne cause. — Je vous pardonne, Milords.

Pendant qu’on le transportait au lieu de l’exécution, il conserva jusqu’au dernier moment la même fermeté, le même enthousiasme.