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LES PURITAINS D’ÉCOSSE

— Messieurs, si vous avez résolu de me condamner sans m’entendre, dit Morton, ma vie est en votre pouvoir, mais vous en répondrez devant Dieu et devant les hommes…

De nouvelles clameurs l’interrompirent. — Laissez-le parler, dit Macbriar.

Morton, ayant obtenu silence, expliqua les raisons qui l’avaient conduit au camp de Monmouth, rendit compte de l’entretien qu’il avait eu avec le duc, détailla sa conduite pendant l’action, et finit par dire que si chacun avait voulu combattre comme lui, l’armée presbytérienne, au lieu d’être dispersée et détruite, serait triomphante, ou du moins en état d’obtenir des conditions de paix favorables.

— Vous l’entendez ! dit un des caméroniens. — Il vient d’avouer ses vues charnelles, son érastianisme. Qu’il meure !

— Paix ! s’écria Macbriar, j’ai encore à l’interroger. — N’est-ce point par ton secours que le réprouvé Evandale a échappé à la mort et à la prison ? N’est-ce pas toi qui a sauvé du tranchant du glaive Miles Bellenden et sa garnison de coupe-jarrets ?

— Si ce sont là des crimes, je suis fier de les avouer.

— Vous l’entendez ! dit le prédicateur. Et n’est-ce pas pour l’amour d’Edith Bellenden ?

— Vous êtes incapables d’apprécier mes sentiments pour cette jeune dame, s’écria Morton.

— Tu es un rebelle endurci à la vérité… Mais, en sauvant ainsi la vieille Marguerite Bellenden et sa petite-fille, ton but n’était-il pas de faire avorter les sages projets de Burley, à qui Basile Olifant avait promis de se joindre avec tous ses vassaux, s’il héritait des possessions de ces deux femmes ?

— Jamais je n’ai entendu parler de cet infâme projet. Votre religion vous permet-elle donc d’employer des moyens si immoraux pour augmenter le nombre de vos partisans ?

— Il ne t’appartient pas de discuter avec les régulateurs des consciences, ni d’interpréter les lois du Covenant, dit Macbriar. Au surplus, vous avez avoué assez de crimes pour attirer la colère du ciel sur une armée. La Providence vous a livré entre nos mains pour vous faire subir le châtiment dû à celui dont les iniquités ont fait tomber le courroux de Dieu sur Israël. Nous serions coupables si nous vous laissions la vie… Écoutez-moi donc : c’est aujourd’hui le jour du sabbat, nous ne le profanerons point par l’effusion du sang ; mais dès que cette horloge aura marqué minuit, vous serez rayé de la liste des vivants. Profitez des courts instants qui vous restent ; et préparez-vous au passage de l’éternité… Mes frères, saisissez le prisonnier, et emparez-vous de ses armes.