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LES PURITAINS D’ÉCOSSE

obtenir la permission de le voir ; mais elle ne savait pas que j’étais derrière ses talons.

— Et vous m’avez fait une fière peur quand vous m’avez arrêtée.

Cuddy, un peu radouci, regarda en souriant sa rusée maîtresse ; et Morton se rendit à la maison où lord Evandale était détenu.

— Y a-t-il du nouveau ? demanda-t-il aux sentinelles en arrivant.

— Rien d’extraordinaire, dit l’une d’elles, si ce n’est la jeune fille que Cuddy a arrêtée et deux messagers que Burley vient d’envoyer à Kettledrummle et à Macbriar.

— C’est sans doute pour les engager à revenir au camp, dit Morton.

— C’est ce qu’on m’a dit, répondit la sentinelle.

— Burley, pensa Morton, veut s’assurer la majorité dans le conseil, il faut que je me hâte, ou l’occasion est perdue.

En entrant dans la chambre où l’on avait déposé le prisonnier, Henry le trouva chargé de fers. Evandale se souleva dès qu’il l’entendit entrer, et offrit à ses yeux des traits tellement changés par la perte de sang qu’avaient occasionnée ses blessures, et par le défaut de nourriture, qu’on aurait eu peine à reconnaître eu lui le jeune officier plein de vigueur. Il reconnut Morton, et témoigna quelque surprise.

— Je suis désespéré de vous voir ainsi, Milord, lui dit Henry.

— Mon emprisonnement est un mal bien court, puisque je dois en être délivré demain matin,

— Par la mort !

— Sans doute. Je n’ai pas d’autre espérance. Votre collègue Burley me l’a fait annoncer.

— Mais Bellenden peut rendre le château pour vous sauver la vie.

— Il n’en fera rien, tant qu’il aura un homme et qu’il pourra lui donner de quoi l’empêcher de mourir de faim.

Morton s’empressa d’informer Evandale du complot formé par les dragons de livrer à l’ennemi le château, le major et les dames. Il pouvait à peine l’en croire. Enfin, revenu de sa surprise. — Que faire ? dit-il, vivement affecté ; comment prévenir un tel malheur ?

— Écoutez-moi, Milord ; j’ai cru que vous vous chargeriez sans répugnance d’être porteur de la branche d’olivier entre notre maître le roi Charles II et cette partie de ses sujets à qui la nécessité, et non l’amour de la révolte, a mis les armes à la main.

— Vous rendez justice à mes sentiments.

— Permettez-moi d’achever. Je vais vous mettre en liberté et vous renvoyer au château, sous condition qu’il me sera rendu sur-le-champ. En agissant ainsi, vous ne ferez que céder à la nécessité :