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LES PURITAINS D’ÉCOSSE

— Je crois, Cuddy, que, sachant d’où vient cet argent, nous pouvons nous en servir sans scrupule ; mais je veux partager avec vous.

— Un moment, monsieur Henry ! Cette bague qui était suspendue sur son sein par un ruban noir… Pauvre diable ! C’est peut-être quelque souvenir d’amour ! Et voici un livre avec des papiers. J’ai trouvé deux ou trois objets que je garderai pour mon usage, avec une provision de linge.

— Pour un débutant, Cuddy, vous ne commencez pas mal.

— N’est-il pas vrai ? Je vous avais bien dit que je n’étais pas si bête quand il s’agissait de l’adresse des mains ; et Dieu merci ! j’ai trouvé deux bonnes montures.

— Très bonne acquisition, Cuddy. Mais quel est ce porte-manteau ?

— Il appartenait hier à lord Evandale, aujourd’hui il est à vous. Et à ce propos je voudrais bien aller voir ce que devient ma mère.

— Je ne puis accepter ces objets sans vous récompenser.

— Allons donc, Monsieur, prenez toujours : quant à la récompense, nous en causerons une autre fois.

Ne pouvant décider son serviteur désintéressé à rien accepter pour lui de ces dépouilles de guerre, Morton résolut de profiter de la première occasion pour restituer ce qui appartenait à lord Evandale, s’il vivait encore ; en attendant, il n’hésita pas à faire usage du butin de Cuddy pour changer de linge.

Il jeta ensuite les yeux sur les papiers de Bothwell ; il y en avait de plusieurs sortes : le contrôle de ses cavaliers, les doubles d’un mandat du conseil privé pour arrêter diverses personnes ; plusieurs certificats des chefs sous lesquels il avait servi, et qui tous faisaient l’éloge de son courage ; mais la pièce la plus remarquable était son arbre généalogique, dressé avec un grand soin, et accompagné des documents nécessaires pour en démontrer l’authenticité, Il s’y trouvait aussi une liste très exacte de tous les biens qui avaient été confisqués sur les comtes de Bothwell, avec le nom des courtisans à qui Jacques VI les avait accordés, et de ceux qui en étaient actuellement possesseurs.

À ces documents, qui peignaient le caractère et les sentiments du propriétaire de ces papiers, il s’en joignait d’autres qui le montraient sous un jour bien différent. Dans un secret du portefeuille, étaient deux ou trois lettres d’une écriture de femme. La date en remontait à vingt ans ; elles ne portaient point d’adresse, et n’étaient signés que par des initiales. Sans avoir le temps de les lire attentivement, Morton s’aperçut qu’elles contenaient les expressions d’un amour fidèle, qui cherche à calmer les soupçons jaloux