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LES PURITAINS D’ÉCOSSE

wood en lui présentant d’un air d’indifférence la bourse un peu désenflée.

Le vieillard tendit une seconde fois la main pour la reprendre ; mais mistress Wilson lui dit bas à l’oreille : — Êtes-vous fou ? priez-le de la garder. Croyez-vous qu’il ait dessein de vous la rendre ? Ayez au moins l’air de la donner.

— Impossible, Alison ! répondit l’avare, je ne puis dire à ces coquins que je leur donne un argent que j’ai compté tant de fois.

— Il faut donc que je le leur dise, moi, pour éviter de plus grands malheurs. — Monsieur, dit-elle à Bothwell, mon maître me charge de vous dire qu’il lui est impossible de reprendre un argent qui se trouve en si bonnes mains. Il vous prie de le garder, et de traiter son neveu le mieux possible, d’adresser au conseil privé un rapport favorable sur son compte, et de ne pas faire attention aux sots discours d’une vieille misérable qui n’est ici que depuis hier soir, qui va en être chassée, et qui n’y remettra jamais les pieds.

— Oui, oui, c’est cela. Je savais bien que dès que votre maudite langue aurait prononcé trois mots, nous serions encore obligés de nous remettre en voyage, dit Cuddy à sa mère.

— Paix ! mon fils, paix ! ne murmurez pas contre nos croix. Remettre le pied ici ! non vraiment : le signe qui doit arrêter l’ange exterminateur n’est pas tracé sur la porte.

— La voilà encore avec son Covenant, mon brigadier, dit un des soldats ; n’emmènerons-nous pas cette vieille ?

— Taisez-vous, pardieu ! lui répondit Bothwell à voix basse : ne voyez-vous pas qu’elle est bien où elle est, tant qu’il y aura ici un héritier responsable, et riche en espèces, comme M. Morton de Milnwood, qui a le moyen de payer pour les fautes des autres ? Que la vieille s’en aille élever une autre couvée ; elle est trop coriace pour être bonne à autre chose. — Allons, Messieurs, une dernière santé avant de partir. — À M. Morton de Milnwood, à son hospitalité, au plaisir que nous aurons à le revoir ! et cela ne sera pas long s’il garde à son service des fanatiques de cette espèce.

Bothwell ordonna alors à ses soldats de monter à cheval, et s’empara pour son prisonnier du meilleur que put fournir l’écurie de Milnwood ; mais en route, exécutant la promesse qu’il avait faite de le bien traiter, il lui fit délier les mains, et ne prit d’autres précautions que de le placer entre deux cavaliers. Mistress Wilson, les larmes aux yeux, remit à Henry un petit paquet contenant les choses qui lui étaient indispensables, et une petite somme d’argent. Cela fait, la troupe partit et laissa la maison dans un trouble extrême.

Accablé de l’aventure de son neveu, et désespéré d’avoir donné