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de m’être rendu, allons nous jeter aux pieds de ce brave jeune homme !

— Non, dit Rébecca ; oh ! non, non, non ; je n’ose pas lui parler en ce moment. Hélas ! je lui en dirais plus que… Non, mon père ; quittons à l’instant ces lieux funestes.

— Mais, ma fille, dit Isaac, quitter ainsi celui qui est venu comme un homme fort, armé de sa lance et de son bouclier, pour te délivrer au mépris de sa vie, toi, la fille d’un peuple étranger au sien ! C’est un service auquel nous devons toute notre reconnaissance.

— Elle lui est acquise, mon père, elle lui est acquise à jamais, répondit Rébecca ; mon âme en est pénétrée ; mais pas à présent… Pour l’amour de ta Rachel bien-aimée, mon père, cède à ma prière, pas à présent !

— Mais, reprit Isaac persistant toujours, on dira que nous ne sommes pas plus reconnaissants que des chiens.

— Ne vois-tu pas, mon cher père, que le roi Richard est ici, et que… ?

— C’est vrai, ma très bonne, ma très prudente Rébecca. Sortons d’ici, sortons d’ici ! Il aura besoin d’argent, car il vient d’arriver de la Palestine, et même il sort de prison, dit-on, et il trouverait facilement une excuse pour m’en demander, s’il lui en fallait une, dans les relations que j’ai eues avec son frère Jean. Allons, allons, quittons ces lieux !

Et, entraînant sa fille à son tour, il la conduisit hors de la lice et la fit transporter en sûreté chez le rabbin Nathan Ben-Samuel.

Quoique cette journée eût dû son principal intérêt à la situation critique où s’était trouvée la belle juive, elle se retira sans être remarquée. Le peuple portait toute son attention sur le chevalier noir ; il remplissait l’air des cris de « Vive Richard Cœur-de-Lion ! À bas les templiers usurpateurs ! »

— Malgré tout cet étalage de loyauté, dit Ivanhoé au comte d’Essex, il est fort heureux que le roi ait eu la pré-