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IVANHOÉ.

pour vous conduire à la mort, Rébecca, et cependant ils ne vous laisseraient pas insulter, même par moi, si mon délire me poussait jusque-là.

— Que le Ciel en soit loué ! s’écria la juive ; la mort est la moindre de mes craintes dans cette tanière du crime.

— Sans doute, répliqua le templier, l’idée de la mort est reçue sans répugnance lorsque la voie qui y conduit est courte et directe. Un coup de lance ou d’épée pour moi, pour vous une chute du haut d’une tour élevée ou la pointe d’une dague tranchante n’auraient rien qui nous effrayât, en comparaison de ce que vous et moi regarderions comme le déshonneur. Écoutez-moi ; il se peut bien que mes idées d’honneur, Rébecca, ne soient pas moins imaginaires que les vôtres ; mais tous deux nous saurions également mourir pour elles.

— Malheureux ! dit la juive, êtes-vous donc contraint à exposer votre vie pour des principes dont votre sain jugement ne reconnaît pas la force ? Assurément, c’est donner un trésor pour ce qui ne peut se convertir en pain ; mais ne croyez pas qu’il en soit ainsi de moi. Votre résolution peut varier au gré des vagues agitées et capricieuses de l’opinion humaine ; la mienne est ancrée sur le rocher immuable des siècles.

— Silence, jeune fille ! reprit le templier, de pareils discours sont maintenant hors de saison. Vous êtes condamnée à mourir, non d’une mort soudaine et facile, telle que la misère la choisit et que le désespoir la recherche, mais d’une mort lente, terrible, accompagnée de cruelles tortures réservées à ce qu’une superstition infernale appelle votre crime.

— Et à qui, si tel est mon destin, à qui le devrais-je ? répondit Rébecca ; n’est-ce pas à celui-là seul dont l’égoïsme brutal m’a traînée ici, et qui maintenant, dans un but que j’ignore, cherche à m’épouvanter en me faisant l’horrible tableau du sort misérable auquel il m’a exposée ?

— Ne croyez pas, dit le templier, que je vous aie livrée