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IVANHOÉ.

propre sécurité. Aie bon courage, et mets-toi en route pour découvrir ce Wilfrid d’Ivanhoé ; j’agirai aussi de mon côté, car ce serait un grand péché de t’abandonner dans cette calamité. Je vais me rendre à York, où un grand nombre de guerriers et d’hommes forts se sont réunis, et sois certain que j’y trouverai quelqu’un qui combattra pour toi ; car l’or est leur dieu, et ces hommes sont toujours prêts à engager leur vie pour de l’or, aussi bien que pour des terres. Mon frère, tu ne manqueras pas d’accomplir les promesses que je pourrai faire en ton nom ?

— Assurément, mon frère, répondit Isaac, et béni soit le Ciel qui m’a envoyé un consolateur dans ma misère ! Cependant n’accède pas tout de suite à leur demande ; car la qualité reconnue de ce peuple maudit est de commencer par exiger des livres et de finir par accepter des onces. Au surplus, fais comme tu voudras, car cette affaire me bouleverse l’esprit ; et à quoi me servirait mon or si l’enfant de mon amour était arrachée de mes bras ?

— Adieu, dit le médecin, et que les désirs de ton cœur soient exaucés !

Ils s’embrassèrent, et chacun d’eux prit la route qu’il devait suivre. Le paysan perclus demeura quelque temps à les suivre des yeux.

— Ces chiens de juifs, s’écria-t-il enfin, ils ne font pas plus d’attention à moi que si j’étais un esclave ou un Turc ! Ils auraient bien pu me jeter un sequin ou deux ! Je n’étais pas obligé de leur apporter ce billet, au risque d’être ensorcelé, comme beaucoup de gens me l’ont dit. Et que m’importe la pièce d’or que la jeune fille m’a donnée si je suis réprimandé par le prêtre le jour de Pâques, et si je dois lui donner deux fois autant pour me mettre bien avec lui, et, par dessus le marché, si je suis appelé pendant toute ma vie « le courrier des juifs, » comme cela pourra bien m’arriver. Je crois que j’ai été véritablement ensorcelé quand je me suis approché de cette fille ! Mais il en a toujours été ainsi pour tous ceux qui se sont approchés d’elle. Personne