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IVANHOÉ.

père. Cependant, car la belle et sage fille d’Isaac n’était pas exempte de toute faiblesse féminine, elle ne put s’empêcher de soupirer intérieurement quand le regard d’admiration respectueuse, mêlée d’une teinte de tendresse, avec lequel jusqu’ici Ivanhoé avait contemplé sa bienfaitrice inconnue, eut fait brusquement place à des manières froides, calmes et recueillies, et qui ne trahissaient que cette reconnaissance que mérite un service rendu par une personne d’une classe inférieure. Ce n’est pas que le premier regard d’Ivanhoé eût exprimé plus que cet hommage général que la jeunesse rend toujours à la beauté ; cependant, il était mortifiant pour cette jeune fille, qui n’ignorait certainement point ses titres à cet hommage, de voir qu’un seul mot avait suffi pour faire redescendre, comme par un charme, la pauvre Rébecca dans une classe dégradée, où ce respect ne pouvait honorablement lui être rendu.

Mais, dans la douceur et la candeur de son caractère, Rébecca ne fit pas un crime à Ivanhoé de partager les préjugés de son siècle et de sa religion.

Au contraire, la belle juive, bien qu’elle sût que son malade la regardait maintenant comme une personne réprouvée, avec laquelle il était défendu d’avoir aucune relation, sauf les plus indispensables, ne cessa pas d’accorder à son malade les mêmes attentions patientes et dévouées.

Elle l’informa de la nécessité où ils se trouvaient de se rendre à York, et de la résolution de son père de l’y transporter et de le soigner dans sa propre maison, jusqu’à ce que sa santé fût rétablie.

Ivanhoé montra pour ce projet une grande répugnance, qu’il fondait sur son désir de ne point occasionner d’autre embarras à ses bienfaiteurs.

— N’y a-t-il pas, dit-il, à Ashby ou dans les environs, quelque franklin saxon, ou bien quelque fermier opulent qui se chargerait de recevoir chez lui un compatriote blessé, et de le garder jusqu’au moment où il pourrait reprendre ses armes ? N’y a-t-il pas de couvent de fondation saxonne