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IVANHOÉ

dans le danger. Mais parle, moine ! dis-nous une bonne fois ce que ton maître attend de nous.

— Sous votre bon plaisir, monseigneur, on a mis la main sur Sa Révérence notre pieux prieur, en dépit de la bulle que j’ai déjà citée ; et les hommes de Bélial, ayant pillé ses coffres et ses sacs, l’ont dépouillé de deux cents marcs d’or pur et raffiné. Ils demandent, en outre, une forte somme avant de le laisser sortir de leurs mains infidèles. C’est pourquoi le révérend père en Dieu vous prie, comme ses meilleurs amis, de venir à son aide, soit en payant la rançon qu’on exige de lui, soit par la voie des armes, à votre discrétion.

— Que le diable emporte le prieur ! s’écria Front-de-Bœuf. Il faut que ses libations du matin aient été fréquentes ! Où ton maître a-t-il vu qu’un baron normand ouvrît sa bourse pour secourir un prélat dont les sacs sont dix fois plus lourds que ne peuvent l’être les siens ? Et comment pourrions-nous le délivrer par la force, nous qui sommes inférieurs en nombre et qui à chaque instant attendons un assaut ?

— Et voilà justement ce que j’allais vous dire, répondit le moine, mais vous êtes trop prompt et ne me donnez pas le temps. Que Dieu ait pitié de moi ! Je suis vieux, et la vue de ces outlaws suffit pour troubler le cerveau d’un vieillard. Néanmoins, il est vrai qu’ils forment un camp et qu’ils élèvent un retranchement vis-à-vis des murs de ce château.

— Aux remparts ! s’écria de Bracy, et voyons ce que ces rustres font au-dehors.

En disant ces mots, il ouvrit une fenêtre grillée qui donnait sur une espèce de plate-forme ou balcon saillant, et, de là, il cria à ceux qui étaient dans la salle :

— Par saint Denis ! les nouvelles du vieux moine sont vraies. Ils avancent des mantelets et des palisses[1], et les archers se groupent sur la lisière du bois comme un sombre nuage avant la tempête.

  1. Les mantelets étaient des défenses provisoires et locomobiles