Page:Scott - Ivanhoé, trad. Dumas, 1874.djvu/34

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Le compagnon du prélat était un homme de quarante ans passés, maigre, fort haut de taille et musculeux ; personnage athlétique à qui une longue fatigue et un constant exercice semblaient n’avoir laissé aucune des parties charnues du corps humain ; car tout était réduit chez lui aux os, aux muscles et aux tendons, qui avaient déjà enduré mille fatigues et qui étaient prêts à en endurer mille autres encore.

Sa tête était coiffée d’un bonnet écarlate garni de fourrures, de la forme de ceux que les Français appellent mortier, par sa ressemblance avec un mortier renversé. Son visage était donc complètement découvert, et son expression avait de quoi inspirer le respect, sinon la crainte, aux étrangers : des traits saillants, naturellement forts et puissamment accentués, étaient, sous le hâle d’un soleil tropical, devenus d’un noir d’ébène, et, dans leur état ordinaire, semblaient sommeiller après le passage des passions. Mais la proéminence des veines du front, la promptitude avec laquelle s’agitaient, à la moindre émotion, sa lèvre et ses épaisses moustaches, annonçaient évidemment que la tempête n’était qu’assoupie et se réveillerait facilement. Ses yeux noirs, vifs et perçants, racontaient, à chaque regard, toute une histoire de difficultés vaincues, de dangers affrontés, et semblaient porter un défi à toute opposition à ses désirs, et cela pour la seule jouissance de balayer cette opposition de son chemin en exerçant son courage et sa volonté.

Une profonde cicatrice, creusée sur son front, donnait une nouvelle férocité à son aspect et une expression sinistre à l’un de ses yeux, qui, légèrement atteint par la même blessure, avait, tout en conservant une vue parfaite, légèrement dévié de la ligne de son voisin.

Le costume de la partie supérieure de ce personnage ressemblait, par la forme, à celui de son compagnon, puisque, comme celui de son compagnon, c’était un manteau monastique ; mais sa couleur écarlate indiquait qu’il n’ap-