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IVANHOÉ.

liers composant le second rang des deux partis, qui, agissant comme réserve, s’élançaient maintenant au secours de leurs compagnons. Ceux qui tenaient pour Brian de Bois-Guilbert criaient :

Bauséant ! Bauséant[1] ! Pour le Temple ! pour le Temple !

Le parti opposé répondait à ce cri par celui de :

Desdichado ! Desdichado ! mot de ralliement qu’ils empruntaient à la devise de l’écu de leur chef.

Les champions se rencontrant ainsi avec la plus grande furie et avec un succès balancé, la fortune du combat semblait incliner tantôt vers le midi, tantôt vers le nord de la lice, selon que l’un ou l’autre parti dominait.

Pendant ce temps, le retentissement des coups et les cris des combattants se mêlaient effroyablement au son des trompettes, et absorbaient les gémissements de ceux qui tombaient et qui roulaient sans défense sous les pieds des chevaux. Les splendides armures des combattants, maintenant souillées par le sang et par la poussière, cédaient à chaque coup de l’épée et de la hache d’armes. Les joyeux panaches arrachés des casques étaient soulevés par la brise comme des flocons de neige. Tout ce qu’il y avait de beau et de gracieux dans l’équipement militaire avait disparu, et ce qu’on voyait maintenant ne pouvait qu’inspirer la terreur ou la compassion.

Cependant, telle est la force de l’habitude, que non-seulement les spectateurs vulgaires, qui sont naturellement stimulés par des scènes de sang, mais même les dames de distinction qui encombraient les galeries, virent le combat avec un intérêt d’angoisse, il est vrai, mais sans désirer de détourner les regards d’une si terrible vue. Çà et là, à la vérité, une belle joue pouvait pâlir ou un faible cri se

  1. Bauséant était le nom de la bannière des templiers, qui était moitié blanche, moitié noire, pour indiquer, dit-on, qu’ils étaient justes et candides envers les chrétiens, mais noirs et terribles envers les infidèles.