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IVANHOÉ

chevalier Déshérité, la partie de la lice devant laquelle il passait méritait sa prédilection.

Cédric le Saxon, transporté de joie à la vue de la défaite du templier, et plus encore par la mésaventure de ses deux ennemis Malvoisin et Front-de-Bœuf, avait, le corps penché hors du balcon, accompagné le vainqueur dans chacune de ses courses, non pas des yeux seulement, mais avec tout son corps et toute son âme. Lady Rowena avait de son côté suivi les événements de la journée avec une attention égale, mais sans trahir ouvertement un intérêt aussi intense. Il n’y avait pas jusqu’au nonchalant Athelsthane, qui, ayant un peu secoué son apathie, n’eût demandé un grand gobelet de vin épicé et ne l’eût bu à la santé du chevalier Déshérité.

Un autre groupe, placé sous la galerie occupée par le Saxon, avait montré tout autant d’intérêt pour le résultat de la journée.

— Père Abraham, dit Isaac d’York, quand la première course eut été achevée entre le templier et le chevalier Déshérité, avec quelle fureur il chevauche ce gentil et bon cheval, qui est venu de l’Afrique même ; il n’en a pas plus de souci que si c’était le poulain d’un âne sauvage ; et cette noble armure qui a valu tant de sequins à Joseph Pereira, l’armurier de Milan, sans compter soixante et dix pour cent de profit, il en fait aussi peu de cas que s’il l’eût trouvée sur le grand chemin.

— S’il met en péril sa propre personne et ses membres, mon père, dit Rébecca, en soutenant une si terrible lutte, comment espérez-vous qu’il épargnera le cheval et l’armure ?

— Enfant, reprit Isaac un peu irrité, tu ne sais ce que tu dis ; son cou et ses membres sont à lui, mais son cheval et son armure appartiennent à… Ô patriarche Jacob ! qu’allais-je dire ? Néanmoins, c’est un brave jeune homme ; vois, Rébecca, regarde, il va encore livrer bataille au Philistin. Prie, mon enfant, prie pour le salut du brave jeune homme, et du cheval rapide et de la riche armure. Dieu de mes