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IVANHOÉ

spectateurs, qui partirent d’un immense éclat de rire, auquel le prince Jean et sa suite se joignirent cordialement.

— À moi le prix, cousin prince ! s’écria Wamba ; j’ai vaincu mon ennemi en loyal combat, avec l’épée et le bouclier, ajouta-t-il en brandissant le jambon d’une main et l’épée de bois de l’autre.

— Qui es-tu, que fais-tu, vaillant champion ? demanda le prince Jean riant toujours.

— Un fou en ligne directe, répondit le bouffon ; je suis Wamba, fils de Witless, qui était fils de Weatherbrain, lequel était fils d’un alderman.

— Qu’on fasse place au juif sur le devant du cercle inférieur ! dit le prince Jean, qui n’était peut-être pas fâché de saisir une occasion de ne pas persister dans son premier dessein ; car ce serait contraire aux lois de la chevalerie, de placer les vaincus avec les vainqueurs.

— Il serait bien pis encore de mettre l’usurier avec le fou, et le juif avec le jambon, dit Wamba.

— Grand merci, bon compagnon, dit le prince Jean, tu me plais. Allons, Isaac, donne-moi une poignée de besants.

Comme le juif, ébahi de la demande, n’osait pas refuser et, ne voulant pas consentir, furetait de la main dans le sac fourré qui pendait à sa ceinture, et cherchait peut-être à se rendre compte combien peu de pièces pouvaient passer pour une poignée, le prince s’inclina sur le cou de son cheval et trancha l’hésitation d’Isaac en saisissant la sacoche même, et jeta à Wamba quelques-unes des pièces d’or qu’elle contenait, continua son chemin dans la lice, abandonnant le juif aux huées de ceux qui l’entouraient, et recevant lui-même autant de bravos que s’il venait d’accomplir la plus honnête et la plus honorable action.