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pellent les plus mauvais jours. À Saint-Pierre, la minorité, qu’un représentant colonial, du haut de la tribune, qualifiait d’infime, et jugeait prête à se rallier par intérêt sous la bannière de son collègue vainqueur, après avoir apprécié les inconvénients d’une manifestation collective, m’a donné spontanément et spécialement le mandat de protester en son nom contre ces accusations toujours renouvelées, qui trahissent des antipathies aussi profondes qu’incurables.

Le sol des Antilles est la patrie commune de trois races qui y vivent sous la même nationalité ; si l’une d’elles est la moins nombreuse, elle est la plus forte, parce qu’elle se recrute sans cesse dans la mère-patrie dont la puissance imposante est une garantie rassurante et souveraine. La plus faible, sans contredit, est celle que la calomnie poursuit à outrance, que l’oppression de ses pères dénaturés a déshéritée dès son berceau, qui gravite laborieusement vers le niveau social, et que repousse la réaction des préjugés dont elle fut toujours la victime.

L’histoire dira ses souffrances et sa tendance naturelle à la conciliation dont elle est l’image vivante. Sans doute elle revendique la dignité du citoyen ; c’est là sa conspiration morale et permanente ; sans doute elle aime la République qui a brisé ses fers, c’est