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l’instar, nous l’avons déjà remarqué, des Ioniens, des Achéens, des Doriens, des Hellènes, etc, chez les Grecs, des Ramnes, des Tities, des Lucères et des minores gentes, chez les Romains, et ainsi de suite chez les Germains et chez les Gaulois.

Les cinq janâs précités prennent une place trop considérable dans les hymnes, de tous les mandalas, du 1er au 10me[1], leur état fédératif y est indiqué si expressément, par les termes de panca janâh, de panca mânavâh, de panca mânushâh, de panca hshitayah, de panca carshanayah, de panca krishthayah[2], leur religion est si manifestement le culte des fonctions de la nature et des héros nationaux, pour que nous puissions craindre de nous tromper en affirmant que lesdites tribus ou clans nous donnent la forme du régime social et religieux de la race. Eh bien, cette forme était celle d’une société démocratique fondée sur l’autorité sacrée et inviolable du pitar, le paterfamilias, mais tempérée par le respect dû à un roi élu comme aussi par l’ascendant du rishi, chantre ou prophète, le kavi. Les princes et les rishis avaient leur club, sabhâ ; le peuple avait ses assemblées, samiti, accessibles à tout le monde, samitih samâni. « Rassemblez-vous, dit un hymne, conférez ensemble, mettez-vous d’accord pour les mesures à prendre en assemblée plénière »[3]. L’analogie avec la constitution sociale primitive des Grecs, des Romains, des Germains et peut-être aussi avec celle des Gaulois est frappante[4].

Ainsi, point de caste pendant la première époque, ni rien qui ressemble à une telle institution. Ce qu’on remarque seulement chez les Aryas, c’est une forte tendance au particularisme ; chacun tient à son individu, porte la tête haute et regarde tout le monde en face. Il y a quelque réminiscence de cet antique état social dans l’usage qui règne parmi les Indiens du Sud principalement, d’ajouter à leur nom telle ou telle épithète honorifique. Par exemple, les vaiçyas à Java et à Dali se désignent par le mot gusti[5]. C’est un titre tellement estimé qu’il équivaut à « seigneur », et qu’on le place même devant le nom de Dieu. Dans le Dekhan, toutes les castes ont des terminaisons honorifiques collectives, par exemple telles que nâyakhar, pillae seigneur, grâmani possesseur,

  1. V. entre autres’R. V., I, 108, 8 ; I. p. 852 ; IV, 30 ; VII, 83. 7.
  2. V. R. V., III, 37, 9 ; 59, 8 ; VI, 11, 4 ; VIII, 32, 22 ; IX, 65, 23 ; 92, 3 ; X, 45, 6 ; VIII, 9, 2 ; I, 7, 9 ; 176, 3 ; V, 35, 2 ; VI, 46, 7 ; VII, 75, 4 ; 79, 1 ; V. 86, 2 ; VII : 15, 2 ; IX, 101, 9 ; III, 2, 10, et al. comme X, 119, 6 ; VI, p. 416 : nahi me akshipaccanâc chântsuh panca.
  3. San gacchadhvan san vadadhvan san vo manânsi jânatân, samâno mantrah samitih samânt. (R. V., X, 191 ; VI, p. 617). — La sabhâ était une assemblée où l’on discutait des questions politiques (VIII, 4, 9,) et aussi une réunion où l’on venait pour causer, sabhâvati vâk (I, 167, 3 ; II, 308) et même pour jouer (X, 34, 6 ; V, 551) des jeux de hasard, aux dés surtout, le jeu indien par excellence.
  4. V. Tacit., Germ. X : Ipse paterfamilias, precatus deos cocultnque inspiciens etc.
  5. On goesti, de goshthi camaraderie. Friederich dit : Goesti, voor allah gebruikt, geeft te kennen, dat het woord met toewan (Heer) gelijk, slaat. » (V. Voorloopig Verslag, etc. Mém. de la Société de Batavia, XXIII, p. 15). — (Cf. Lassen, Ind. Alt., IV, 518).