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ANNALES DU MUSÉE GUIMET

taines cérémonies que je vais décrire maintenant, j’ai été réduit en grande partie aux matériaux et aux renseignements obtenus des naturels que j’ai vus. Je me permets de parler de cette circonstance pour prier le lecteur de la prendre en considération si mes interprétations ne sont pas aussi complètes que semble l’exiger l’importance que les Tibétains attachent à ces questions.

REPRÉSENTATIONS DE DRAMES RELIGIEUX

À certains jours de l’année les Lamas représentent des drames religieux, qu’on appelle Tambin shi[1], « la félicité de l’instruction ». Mon frère Hermann, pendant son séjour au monastère d’Himis, eut la bonne fortune d’assister à la représentation d’un de ces drames donnée expressément pour lui ; en voici la description :

Les dramatis personæ sont des Dragsheds (divinités qui défendent l’homme contre les mauvais esprits, voyez page 70), des démons et des hommes. Les acteurs de chaque groupe se distinguent facilement par le masque (tib. Phrag) qu’ils portent, et beaucoup moins par leurs habits, qui sont des robes étonnamment uniformes et sans signes distinctifs. Les Dragsheds et les démons portent sur leur habit de prêtres de grandes robes de soie de couleurs riches et voyantes ; quelques Dragsheds ont en outre des cuirasses et des armes. Même ceux qui représentent les hommes sont pourvus d’un uniforme particulier quand les moyens du monastère le permettent.

Les masques du premier groupe, les Dragsheds, sont très grands et d’aspect terrible ; le derrière de la tête est couvert d’une pièce triangulaire de coton ou de soie ; par devant aussi une pièce semblable attachée au menton pend sur la poitrine. Le second groupe, les démons, a des masques bruns ou de couleur sombre, de dimensions un peu plus grandes qu’il ne serait convenable, et leurs vêtements sont bien rembourrés, de sorte qu’ils sentent peu les coups qui pleuvent sur eux. Les acteurs de ce groupe et du suivant sont des néophytes ou des laïques. Le troisième groupe, finalement, représente les hommes en habits ordinaires et avec des masques de dimensions et de cou-

  1. L’orthographe de ce mot est ḅstan-pa, « montrer, instruction, doctrine » : i, marque du génitif ; shis, « une bénédiction, bonheur ».