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ANNALES DU MUSÉE GUIMET

des premiers est le bâton d’alarme Kharsil, en sanscrit Hikilo, avec lequel les mendiants bouddhistes de l’Inde font du bruit quand ils quêtent ; en l’agitant ils font sonner les anneaux de métal passés autour du bâton et retenus par une masse de fils métalliques imitant la forme d’une feuille[1]. Les figures de lamas tibétains se reconnaissent à leur bonnet pointu.

Les Dragsheds ou dieux qui protégent l’homme contre les mauvais esprits, sont toujours représentés avec une expression formidable et un teint brun, souvent tout à fait noir[2] ; le troisième œil, l’œil de sagesse, sur le front, a son axe le plus long dans le sens vertical. Lha Doldjang[3], l’épouse déifiée de Srongtsan Gampo, a cet œil dessiné dans la paume de ses mains et sous la plante de ses pieds ; ces marques ont même une ressemblance accidentelle surprenante avec les marques de clous de notre Sauveur. Quelques-uns de ces dieux sont représentés sous la figure d’êtres fantastiques avec la tête ou la queue d’un animal. La gloire est remplacée par des flammes qui symbolisent la destruction[4]. Ils sont presque nus ; la peau de tigre, les pattes attachées autour du cou, pond derrière les épaules, et son extrémité forme la couverture de leur siége ; ils portent aussi un collier de crânes humains et des anneaux aux bras et aux pieds.

Les Dragsheds représentés debout ont les jambes écartées, souvent les pieds appuyés sur des hommes ; quelques-uns sont assis sur des animaux, ordinairement des chevaux ou des Lions ; on voit aussi des chameaux, des yaks, des daims, et même des crocodiles, mais jamais d’éléphants. La couleur de ces animaux s’écarte souvent de la nature, car on trouve des chevaux verts ou jaunes, ainsi que des lions à crinière verte et des crocodiles bleus.

Les instruments que l’on voit dans les mains des Dragsheds sont pour la plupart des symboles de leur pouvoir sur les démons. Ce sont :

  1. Voyez Schiefner, Tib. Lebenbeschreibung, Mém. des Sav. Étr., vol. VI, p. 323, et Foe koue ki, p. 92-355, pour la description du bâton de Sākyamouni. Dans le Kandjour, division Do, vol. XXVI, nous trouvons un traité qui explique l’usage de ce bâton. Csoma, As. Res., vol. XX, p. 479. Les Kharsils gravés sur les sceaux officiels des Lamas chefs de monastères se terminent par un trident au lieu d’une feuille de métal.
  2. Comparez p. 70, et Pallas, Mongol. Völker, vol. II, p. 105.
  3. Voyez page 42.
  4. Ainsi dans le curieux manuscrit sur la mythologie de Berma, offert par le docteur G. von Liebig à la bibliothèque de Munich (Cim. 102), on rencontre à plusieurs reprises cet ornement de flammes employé en guise de couronne ou de bracelets, et même les parties du vêtement qui flottent au vent, se terminent par des flammes.