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LE BOUDDHISME AU TIBET

forme du moins, ne présentent pas le caractère de demandes ou de remerciements, mais expriment seulement le souhait du dévot d’atteindre aux hautes facultés dont jouissent les Bodhisattvas eux-mêmes. D’après les légendes, toutes les fois qu’un bouddhiste accomplit quelque action méritoire, il prononce ces mots : « Puissé-je être délivré de toute peine par le mérite de cette action et puissé-je conduire tous les êtres à la délivrance par mon exemple et mes actions ! » Dans les ouvrages qui appartiennent à la dernière école mahâyâna et aux écoles mystiques nous trouvons ces souhaits liés intimement au dogme de la charité illimitée des Bodhisattvas envers les hommes. Comme exemple je citerai un Tantra du Kandjour, dans lequel sept Bouddhas imaginaires souhaitent, tout en pratiquant une vie de sainteté pour devenir Bouddhas, que tous les êtres animés (ou créatures) qui souffrent telle ou telle sorte particulière de misère ou de détresse puissent, au même moment où eux deviendront Bouddhas, jouir de toutes sortes de prospérités et de bonheur.

Dans les écritures sacrées de tous ces systèmes, les Bouddhas mythologiques, habitants des diverses régions en dehors de la terre, sont fréquemment implorés par des prières dans la stricte acception du mot ; le récit des prières est recommandé comme le meilleur expédient pour effacer les péchés et écarter les obstacles qui empêchent d’obtenir l’émancipation finale.

Telle est aussi dans le Tibet, l’opinion actuelle sur la prière (tib. Monlam). La confiance générale des bouddhistes tibétains en son efficacité est due principalement à ce qu’elle jouit du caractère et possède les vertus des Dhāranis ; les prières sont dotées de pouvoirs surnaturels et exercent une influence magique sur les divinités auxquelles elles sont adressées. Il est clairement évident que c’est là leur but, par la forme même de maintes prières, qui ne sont ordinairement que de simples incantations. Voici par exemple une invocation à la déesse Lhamo : « Accours à mon aide de la région Nord-Est entourée par le grand océan Mouliding, je t’en conjure par la lettre bleue Houm, tracée sur mon cœur, qui répand un rayon de lumière par ses crochets de fer, toi, la souveraine et puissante maîtresse, reine Rimate et tes serviteurs[1]) D’autres prières sont par leur forme, des louanges, ou des hymnes, ou des supplications où figure le nom de la divinité implorée, comme celle-ci :

  1. Voyez, planche no XII, le texte tibétain qu’Adolphe fit écrire par un Lama.