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un terme de palais ! Quelle sottise que de prétendre corriger l’usage par la grammaire ! Et qu’importe-t-il de savoir s’il faut dire « ma grande mère » puisqu’on dit « ma grand’mère. » Aux discours de tous ces pédants, la vieille fille s’impatiente : « A quoy sommes-nous plus bons, dit-elle, s’il nous eschape en songeant un mesme, pour un mesmes, ou un commence, pour un commences ? on nous attend-là de par tous les Dieux, on y guette la victoire et le triomphe sur nous : à l’imitation des petits enfans, qui par jeu complotté font dire à leurs compagnons : petit plat, petit plat : afin que s’il arrive à la langue de celuy qui parle, de fourcher, en prononçant, plit plat, il soit salüé d’une longue huée, avec la perte de l’espingle qu’il a consignée pour enjeu. Et le bon est, qu’observer à leur mode toute ceste chicane de la langue, s’appelle bien parler et bien escrire, s’il les en faut croire. »

Les mères donnent le jour à leurs enfants et les allaitent, mais ce sont fort souvent les vieilles filles qui les élèvent. Marie de Gournay, célibataire par vocation, se devait à elle-même d’écrire des traités de pédagogie bourrés de conseils généreux et d’avis qui empruntent à leur caractère théorique une unité tout à fait démonstrative. Pour célébrer l’union de Henri IV avec Marie de Médicis, la fille d’alliance de Montaigne composa un traité « De l’éducation des enfants de France ». Dans cet ouvrage, elle propose aux nouveaux mariés de s’occuper du choix d’un précepteur pour leurs futurs enfants et elle déplore la mort de son second père qui aurait été l’éducateur