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rappeler quelle est l’étendue de ce principe ; sa portée ou, pour mieux dire, sa forme nécessaire, c’est la distinction du civil et du spirituel. Vinet s’élève en second lieu contre la clause qui, en excluant expressément de l’autorisation les cultes contraires à l’ordre public et à la morale sociale, exprimerait une réserve légitime, mais aurait le tort de n’exprimer qu’au sujet de la liberté religieuse une réserve qui s’applique à toutes les libertés. En troisième lieu, puisque l’Église nationale doit subsister, il faut qu’elle subsiste avec dignité, c’est-à-dire avec liberté, avec cette indépendance qui résulte de la distinction entre la sphère de l’État et celle de l’Église. L’auteur, à la fin de sa brochure, pose les conclusions auxquelles il voudrait amener le lecteur. Ces conclusions s’appuient, non sur des principes généraux, mais sur l’existence et la prospérité de l’Église nationale, parce que c’était là le point de vue du clergé, de la constituante, de Vinet lui-même jusqu’à un certain point. « Je me féliciterai, dit-il, si de tous les faits et de tous les raisonnements de cet écrit, on tire la double conclusion : que l’Église nationale a besoin, pour prospérer, que les autres cultes soient libres ; que l’Église nationale a besoin, pour soutenir cette concurrence, d’être libre elle-même. »

Le public se préoccupait de plus en plus de la question religieuse, lorsque Vinet écrivit, en date du 6 mars, à la Discussion publique[1] une lettre toute pleine d’indignation ou plutôt de douleur ; il s’étonne,

  1. Numéro du 15 mars.