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Sur la spéculation et l’expérience dans la Philosophique.

Je me suis souvent demandé pourquoi il vous parait tout simple qu’un Lesage, par exemple, se livre à des spéculations sur la nature, tandis que vous nous refusez la même faculté, et je n’ai jamais trouvé d’autre réponse que celle-ci : C’est que, dans son système, l’emploi facile et libre des hypothèses est, en quelque sorte, sanctionné, et, autant que possible, éternisé ; au lieu que nous, nous voulons précisément le contraire. Les principes de Lesage sont la preuve la plus manifeste que nous ne savons rien sur les dernières causes de la nature, et un essai, en grand, d’inventer, malgré cette ignorance, un système de la nature, que l’on peut admettre ou rejeter à son choix. J’honore la tendance spéculative et je m’empare de cet exemple à mon profit, moi qui veux donner à cette tendance une meilleure direction, c’est-à-dire, l’appliquer à des principes qui, à mon avis, sont évidents et certains.

Puisque, au moins, vous prenez part, cette tendance qui déjà, cependant, se fait jour, même au sein du plus épais empirisme, j’ai déjà à moitié gagné. Ce n’est pas cette tendance qui a fait tort à la science de la nature, mais l’indigne et fausse direction qu’elle a prise. Vous vous emportez contre elle, vous rejettez sur elle les accusations qui s’adressent à celle-