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Ceci n’est pas seulement manifeste dans la douceur des contours de ses figures, mais aussi dans les formes qui ressemblent, au plus haut degré, à celles des natures purement sensibles dans les ouvrages de l’antiquité. En lui fleurit le véritable âge d’or de l’art, que le doux règne de Chronus vint apporter à la terre. Ici le sourire aimable de l’innocence, le désir naïf, la sérénité, la joie enfantine rayonnent sur des visages ouverts et riants ; ici sont célébrées les saturnales de l’art. L’expression générale de ce style, c’est le clair obscur que Corrège emploie plus qu’aucun autre. Car ce qui, pour le peintre, remplace la matière, c’est l’obscur ; c’est là le fond sur lequel il doit fixer l’apparence fugitive de la lumière et de l’âme. Mieux, par conséquent, le clair et l’obscur se marient ensemble, de telle sorte que de tous deux naisse une chose unique, et, pour ainsi dire, une âme et un corps ; plus l’esprit apparaît sous une forme corporelle et la matière s’élève au niveau de l’esprit.

Quand l’art s’est affranchi des limites de la nature, et que le gigantesque, fruit de sa première liberté, a été refoulé, lorsque la forme et les figures se sont embellies par le pressentiment de l’âme, le ciel s’éclaircit, le terrestre ayant dépouillé sa rudesse, peut s’unir avec le céleste, et le divin avec l’humain. Raphaël prend possession de l’Olympe radieux, et nous conduit avec lui de la terre dans l’assemblée des dieux, au milieu des natures immor-