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La Sculpture, dans le sens rigoureux du terme, dédaigne de donner extérieurement l’espace à son objet ; elle le porte en elle-même. Mais, par-là même, le champ de son développement se trouve fort resserré. Il y a plus, elle est obligée de montrer la beauté de l’univers, en quelque sorte, dans un point. Elle doit donc tendre immédiatement à ce qu’il y a de plus élevé ; elle ne peut atteindre à la variété que dans des images isolées, et par la plus sévère exclusion des éléments qui se contredisent. Par l’élimination du principe purement animal, elle parvient aussi à représenter, dans la nature humaine, d’une manière harmonique et presque belle, des créatures inférieures ; ce que nous apprend la beauté de plusieurs Faunes conservés de l’antiquité. Elle peut même, à l’imitation de la capricieuse nature, se parodier elle-même, retourner son propre idéal, par exemple, dans les formes disproportionnées des Silènes, se jouer, plaisanter, et paraître ainsi s’affranchir du joug de la matière. Mais elle est toujours forcée de placer son œuvre dans une condition tout-à-fait à part, pour le mettre d’accord avec lui-même, et d’en faire comme un monde en soi, parce qu’il n’y a pas pour elle une unité plus haute où la dissonnance des parties puisse s’effacer. Au contraire, la Peinture peut déjà, pour l’étendue, se mesurer avec la nature et composer avec une largeur épique. Dans une Iliade, il y a aussi place pour un Thersite. Et qui est-ce donc qui ne trouverait pas place dans le grand