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objet de la raison, ni ce qui serait dépourvu de connaissance être connu. La science par laquelle agit la nature, sans doute, ne ressemble nullement à celle de l’homme, qui a la conscience réfléchie d’elle-même. Dans la nature l’idée n’est pas différente de l’action ni le but de l’exécution. Aussi, la matière brute tend aveuglément à une forme régulière, et prend, sans le savoir, des formes purement stéréométriques, mais qui appartiennent cependant au domaine des idées et sont quelque chose de spirituel dans la matière. Aux étoiles sont innées une arithmétique vivante et une géométrie sublime, qu’elles observent, sans les connaître, dans leurs mouvements. La connaissance vivante apparaît, plus clairement, incomprise encore, il est vrai, dans les animaux, que nous voyons accomplir, tout stupides et dépourvus de raison qu’ils sont, d’innombrables actions bien supérieures à eux : l’oiseau qui, ivre de musique, se surpasse lui-même dans ses chants harmonieux, la petite créature qui, avec son instinct d’artiste, sans exercice ni éducation, construit d’élégants ouvrages d’architecture, tous guidés par un esprit supérieur, qui déjà brille dans des éclairs d’intelligence, mais nulle part ne reluit, comme un véritable soleil, ailleurs que dans l’homme.

Cette science active est, dans la nature et dans l’art, le lien entre l’idée et la forme, entre le corps et l’âme. A chaque chose correspond une idée éternelle qui réside dans la raison infinie. Mais comment