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pas pour apercevoir les vices et les lacunes du système de Descartes, et en signaler les tendances, pour se moquer des tourbillons, des animaux machines, des esprits animaux, et même pour entrevoir le panthéisme de Spinosa sous la définition cartésienne de la substance. Et cependant cela n’a pas empêché que tous les grands esprits du grand siècle ne se soient ralliés à cette philosophie, n’en aient adopté la méthode et les principes généraux, que ceux-là même qui la combattaient, n’aient été souvent, à leur insu, animés, jusque dans leurs critiques, de son esprit le plus intime, et ne l’aient admise implicitement sur une foule de points, en la reniant dans son ensemble. Cela surtout n’a pas empêché qu’elle ne pénétrât partout, n’étendit son influence à tout, à la littérature comme aux sciences et à la théologie.

Mais la physique de Descartes tomba devant le système du monde de Newton qu’elle avait préparé. Sa métaphysique fut éclipsée par celle de Locke, et le système tout entier fut ébranlé, emporté, jeté hors de ses voies, lorsque d’autres problèmes, que le cartésianisme n’avait pas soupçonnés ou qu’il avait négligés et rejetés sur un plan inférieur, lorsque les questions sociales, politiques, esthétiques vinrent réclamer une place plus large et briser son cadre, changer le point de vue, ouvrir de nouvelles perspectives à la pensée et appeler d’autres solutions. C’est alors que parurent, après les philosophes du xviiie siècle, les hommes qui, en Allemagne, ont agité tous ces