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contraire, est cette force divine qui s’élève au dessus de la personnalité ; capable de sacrifice et de dévoûment, elle contemple les vérités éternelles, le vrai, le beau, le bien, dans leur essence.

L’artiste a plusieurs moyens de représenter l’ame. Déjà, l’idée générale répandue dans son œuvre, qui en harmonise les parties et communique à l’ensemble, avec l’unité, le calme et la sérénité, en offre un premier reflet. Mais c’est surtout dans l’action, dans la lutte des passions que peut se marquer l’intervention de l’ame. En réalité, celle-ci ne s’engage pas dans le combat ; mais sa présence adoucit la violence de la lutte orageuse qui s’élève au sein des puissances de la vie. Dans les situations ordinaires, la raison individuelle suffit pour modérer les passions ; mais dans les scènes vraiment tragiques, quand un conflit s’élève entre les puissances morales elles-mêmes, quand l’ame est mise en péril et risque d’être profanée, c’est alors que la grâce sensible doit s’allier à la beauté morale. La grace sert de sauvegarde à la beauté, l’empêche de rien faire d’inconvenant et qui blesse le sens du beau ; elle change en beauté la douleur, la défaillance, la mort même.

D’un autre côté, si la grâce préserve la beauté, elle a besoin elle-même d’être glorifiée par la victoire de l’âme qui révèle sa nature divine et proclame sa supériorité, en montrant qu’aucune force extérieure ne peut la retenir et l’enchaîner à la terre ; qu’elle est hors de toute atteinte ; que rien ne peut rompre