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belles formes, mais en faisant ressortir l’esprit qui agit dans l’intérieur des êtres.

L’idéal n’est pas le contraire du réel. Sans quoi, en perfectionnant le réel, on ne pourrait produire l’idéal. L’art représente ce qui est réellement dans la nature ; mais il faut distinguer dans la nature ce qui est variable, mobile et passager, de ce qui est véritablement l’être. Idéaliser, ce n’est pas briser, détruire, altérer la forme ; c’est en manifester l’idée, lui donner un caractère plus en harmonie avec le type invariable, éternel, obscurément ou imparfaitement exprimé dans la nature. En réalité, l’art ne peut créer des êtres vivants ; ce n’est pas sur ce point qu’il peut engager la lutte. Encore moins doit-il chercher à faire illusion sur la réalité de ce qu’il montre ; mais, dans des œuvres qui n’ont la vie qu’à la surface, il peut empreindre le cachet d’une plus riche et plus forte vitalité, ou d’une plus haute spiritualité, façonner des images plus transparentes, plus conformes à leur modèle éternel. Il arrête la course rapide des années humaines ; il unit la force virile avec les grâces de la jeunesse ; il efface ce qui est temporel et accidentel ; il saisit, pour chaque être, l’instant unique, le moment de la vraie beauté, l’enlève au temps, le fixe et le fait paraître dans l’éternité de sa vie.

En poursuivant l’examen des rapports des arts du dessin avec la nature, Schelling rencontre un troisième système plus récent, et qui comptait alors des partisans illustres, Lessing, Goëthe lui-même, avaient