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il n’a développé qu’une seule question, mais vaste et féconde. La manière nouvelle dont il envisage la nature devait porter son attention plus particulièrement sur les arts qui ont avec elle le rapport le plus intime.

Les arts du dessin tiennent, à la fois, à la nature physique d’où ils tirent leurs formes et au monde de l’ame, puisque dans ces images c’est la vie et l’esprit qu’ils ont pour but de représenter. De là, deux théories également exclusives et fausses. Les uns ne voient dans les arts du dessin que la reproduction fidèle des formes réelles de la nature sans l’esprit qui les anime et les vivifie. Les autres, s’attachant à l’idée comme à l’élément essentiel, accordent à l’expression une importance absolue, au point de négliger la forme, celle-ci n’est plus qu’une enveloppe, un vêtement, un pur accessoire. D’un côté, on recommande et on pratique à la lettre le précepte de l’imitation de la nature, de l’autre on préconise l’idéal. Mais, outre que le principe de l’imitation de la nature est vague et susceptible d’interprétations très diverses, il s’agit toujours d’une nature morte, inanimée. Aussi l’art ne crée-t-il que des masques, des copies vides de formes, vides elles-mêmes. D’un autre côté, qu’est-ce que l’idéal séparé de la forme qui lui donne un corps et de la réalité ? Une ombre pâle, une froide allégorie. Là ce sont des corps sans ame, ici des âmes sans corps.

Ces deux systèmes ont régné tour-à-tour, ou à la fois, à toutes les époques de l’art, ils ont égaré le talent