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ples principes posés par les maîtres, ont fait prendre en aversion et en dédain les théories et leurs auteurs. On s’est dégoûté de ces systèmes dont les esprits avaient pu se repaître sans danger tant qu’on n’avait pas songé a les appliquer. Les gouvernements se sont mis à les redouter et à les proscrire. La nation elle-même s’est inquiétée pour ses croyances. Les événements de l’ordre politique, le besoin des réformes, la nécessité sentie par les peuples et par les princes eux-mêmes de mettre les institutions plus en harmonie avec les principes du droit public qui doivent régir la société européenne, suffiraient d’ailleurs pour expliquer cette réaction contre les idées spéculatives. L’Allemagne est entrée dans une nouvelle phase de son histoire. Elle a quitté enfin cette existence contemplative si conforme à son génie et où elle s’est complue pendant tant d’années ; elle s’indigne aujourd’hui de s’être laissé devancer par d’autres nations dans la carrière des améliorations sociales, de s’être laissée distraire ; d’elle même et de ses véritables intérêts, en prêtant l’oreille aux ingénieuses combinaisons de ses philosophes ou aux chants harmonieux de ses poètes. Peu s’en faut qu’elle n’en soit venue jusqu’à renier ses plus grands écrivains, ses penseurs les plus célèbres, et à oublier que le rang qu’elle occupe en Europe depuis un demi-siècle, elle le doit à sa littérature et à ses idées.

Quoi qu’il en soit des causes qui ont amené ce changement, est-ce bien à nous de nous emparer