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dans la mythologie, l’art et la science, ce qui domine, c’est le côté naturel. L’infini apparaît sous la forme du fini, dans une unité non encore développée. (Voy. 8e et 9e leçon.) Dans le monde moderne, les deux termes se séparent d’abord. A l’origine éclate leur scission. L’infini s’oppose au fini et le fini à l’infini. Ainsi, le monde moderne est d’abord le monde de l’opposition, de la dualité. Mais cette lutte, nécessaire pour la manifestation de l’infini, selon sa vraie nature, n’est que passagère, c’est une transition pour arriver à une plus haute et plus profonde harmonie. A la dualité doit succéder une unité supérieure, non plus celle de la nature, inconsciente et fatale, mais une unité consciente et réfléchie, qui révèle l’essence des deux termes développés et conciliés. — Telle est la formule avec laquelle Schelling juge les systèmes de la philosophie moderne. Ainsi, déjà dans Descartes, le dualisme se pose nettement par la distinction des deux substances : la matière et l’esprit, l’étendue et la pensée, qui n’ont entre elles aucun lien, aucune communication. Toute la philosophie du xviiie siècle entre dans cette voie, Spinosa seul excepté, génie incompris et méconnu de ses contemporains, qui a devancé son siècle. En vain Leibnitz cherche-t-il à rétablir l’harmonie. Il proclame l’unité et le développement à tous les degrés de l’existence ; mais il reste dans le point de vue inférieur de la réflexion et du raisonnement, au lieu de s’élever au point de vue spéculatif. D’ailleurs, par l’hypothèse de l’harmonie préétablie,