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SOUVENIRS

Le vieux Faucon, accablé d’infirmités, et dédaignant, ainsi qu’il a été dit, de chercher son salut dans la fuite, s’était laissé écraser par la chute d’un énorme pan de muraille. Immobile dans un des coins de la cour, et dans l’attitude résignée du Génie du temps, il mourut sans pousser un seul cri. Cette mort héroïque ne fut pas sans amertume, car il était mort en désespérant du retour de ce passé qu’il n’avait cessé de regretter.

Quant au Lézard, la mort lui vint en dormant, ainsi qu’à la Lézarde et à leur enfant, un bon petit Lézard qui donnait les plus belles espérances. Quelques jours avant cette catastrophe, il paraît que toute la famille avait parlé de s’endormir pour six mois, et comme le disait Jacques, qui puisait de grandes consolations dans cette réflexion : Dormir six mois, ou dormir toujours, c’est presque tout un.

Le vieux serviteur aurait bien voulu mourir bravement, comme son maître ; mais n’est pas Faucon qui veut, et il nous avoua, en baissant la tête, que quand il vit les murailles s’ébranler, il fit comme tous ceux auxquels son seigneur avait donné asile, il s’enfuit !

Jacques semblait n’avoir survécu à ce désastre que pour m’en apporter la nouvelle. Je l’ai pris à mon service pour qu’il fût au service de quelqu’un et pût mourir content. Il est sourd et répond à tout ce qu’on lui demande, comme si on lui parlait du vieux château et de ses habitants.

— Eh bien ! êtes-vous satisfait ? dis-je à mon vieil ami : j’ai parlé de tout et de rien, et de vous-même.