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D’UN MOINEAU DE PARIS.

Antoine, au milieu desquels je parvins à m’échapper et qui furent admirables pour moi. Ce fut alors que j’observai les mœurs du peuple-Oiseau. Je devinai que la vie n’était pas toute dans le boire et dans le manger. J’eus des opinions qui augmentèrent la célébrité que je devais à mes souffrances. On me vit souvent, posé sur la tête d’une statue au Palais-Royal, les plumes ébouriffées, la tête rentrée dans les épaules, ne montrant que le bec, rond comme une boule, l’œil à demi fermé, réfléchissant à nos droits, à nos devoirs et à notre avenir : Où vont les Moineaux ? d’où viennent-ils ? pourquoi ne peuvent-ils pas pleurer ? pourquoi ne s’organisent-ils pas en société comme les Canards sauvages, comme les Corbines, et pourquoi ne s’entendent-ils pas comme elles qui possèdent une langue sublime ? Telles étaient les questions que je méditais.

Quand les Pierrots se battaient, ils cessaient leurs disputes devant moi, sachant que je m’occupais d’eux, que je pensais à leurs affaires, et ils se disaient : — Voilà le Grand-Friquet ! Le bruit des tambours, les parades de la royauté me firent quitter le Palais-Royal : je vins vivre dans l’atmosphère intelligente d’un grand écrivain.

Sur ces entrefaites, il se passait des choses qui m’échappaient, quoique je les eusse prévues ; mais après avoir observé la chute imminente d’une avalanche, un Oiseau philosophe se pose très-bien sur le bord de la neige qui va rouler. La disparition progressive des jardins convertis en maisons rendait les Moineaux du ventre de Paris