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GUIDE-ÂNE

lement un homme de génie annuler ainsi les ingénieux travaux de tant d’observateurs qui ont mis la création en bocal ! On nous calomniera autant que votre grand philosophe a été calomnié. Or, voyez ce qui est arrivé à Jésus-Christ qui a proclamé l’égalité des âmes, comme vous voulez proclamer l’unité zoologique ! C’est à faire frémir. Ah ! Fontenelle avait raison : fermons les poings quand nous tenons une vérité.

— Auriez-vous peur, messieurs ? dit le disciple du Prométhée des sciences naturelles. Trahiriez-vous la sainte cause de l’Animalité ?

— Non, monsieur, s’écria Marmus, je n’abandonnerai pas la science à laquelle j’ai consacré ma vie ; et, pour vous le prouver, nous rédigerons ensemble la notice sur mon Zèbre.

— Hein ! vous voyez, tous les Hommes sont des enfants, l’intérêt les aveugle, et pour les mener, il suffit de connaître leurs intérêts, dit le jeune journaliste à mon maître quand l’unitariste fut parti.

— Nous sommes sauvés ! dit Marmus.

Une notice fut donc savamment rédigée sur le Zèbre du centre de l’Afrique par le plus habile disciple du grand philosophe, qui, plus hardi sous le nom de Marmus, formula complètement la doctrine. Mes deux maîtres entrèrent alors dans la phase la plus amusante de la célébrité. Tous deux se virent accablés d’invitation à dîner en ville, de soirées, de matinées dansantes. Ils furent pro-