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était trop fin pour chercher à se l’attribuer devant des observateurs aussi sceptiques, aussi mal disposés et aussi habiles dans la discussion, que les Koréischites[1]. « Ils disent : Si au moins des miracles lui étaient accordés de la part de son Seigneur, nous croirions. Réponds-leur : Les miracles sont au pouvoir de Dieu, et moi je ne suis qu’un envoyé chargé d’avertir ouvertement »[2]. Mais il ne se contentait pas d’éviter par cet aveu sans détour l’accusation d’imposture ou le ridicule d’une vaine tentative, il voulait en tirer une preuve de sa propre supériorité par la supériorité de l’évidence morale sur l’évidence matérielle. Le Coran, par sa grandeur religieuse (qui est intermittente), par sa beauté littéraire (qui n’a jamais été contestée), devait agir sur les cœurs avec plus d’efficacité que tous les prodiges sensibles : « Le Coran est un recueil de signes évidents dans les cœurs de ceux qui ont reçu la science : il n’y a que les méchants qui nient nos signes […] Ne leur suffit-il pas que nous ayons envoyé le livre dont tu leur récites les versets ! Certes il y a dans ceci une preuve de la miséricorde de Dieu et un avertissement pour tous les hommes qui croient »[3]. Ainsi Mahomet rencontre par hasard une méthode théologique moderne bien connue : l’expérimentation par la conscience, et l’harmonie de l’Évangile avec les aspirations du cœur.

  1. Le ch. XIV de Sprenger raconte ces discussions. D’après une tradition qui y est rapportée, on vint lui dire ironiquement : « change la colline de Safa en or ». Je vais le faire, répond-il, et il appelle Gabriel, lequel lui dit : « Je le ferai si tu le veux, mais il vaut mieux attendre que ceux qui veulent se convertir se convertissent ». C’est vrai, dit Mahomet, j’attendrai.
  2. S. XXIX, v. 49.
  3. S. XXIX, v. 48, 50.