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qui ne divise point l’unité divine, et qui peut au besoin prendre un corps humain pour exécuter les ordres célestes, pour donner le jour à Jésus ou pour dicter le Livre infaillible. Non seulement le Saint-Esprit, hypostase divine, n’existe pas pour Mahomet, mais il n’a même pas l’idée d’attribuer cette croyance aux chrétiens, et de leur en faire un reproche. La Trinité qu’il leur reproche, c’est la famille polythéiste de Dieu, de Jésus et de Marie. À ses yeux, c’est une idolâtrie qui mérite d’être confondue avec le culte des anges et des génies : « Ils ont associé les génies à Dieu, pendant que c’est lui qui les a créés ; dans leur ignorance, ils lui inventent des fils et des filles. Gloire à lui ! il est trop au-dessus de ce qu’ils lui attribuent. Créateur du ciel et de la terre, comment aurait-il des enfants, lui qui n’a point de compagne ? […] Dieu n’a point de fils, et il n’y a point d’autre dieu à côté de lui ; autrement chaque dieu s’en irait avec ce qu’il a créé, et les uns seraient plus élevés que les autres. Loin de la gloire de Dieu les mensonges qu’ils inventent ! »[1]

Cette énorme méprise — rien ne semble indiquer que ce fût autre chose — a besoin d’être expliquée autrement que par l’existence d’un courant nestorien, car jamais écho des passions soulevées contre le concile d’Éphèse n’a pu attribuer à l’Église officielle la substitution de Marie au Saint-Esprit. La secte déjà mentionnée des Collyridiennes, dont quelque vague souvenir avait pu persister en Arabie, l’image de la Vierge sur les murs de la Kaaba, la trop réelle idolâtrie de Marie répandue chez les fidèles de l’Église orientale, ont pu donner à Mahomet l’idée à peine

  1. S. VI, v. 100, 101 ; S. XXIII, v. 93.