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enfants d’Israël ! adorez Allah, qui est mon Seigneur et le vôtre ? À quiconque associe à Allah d’autres dieux, Allah lui interdira l’entrée du jardin… Si Dieu avait un fils, je serais le premier à l’adorer… Peu s’en faut que les cieux ne se fendent à ces mots, que la terre ne s’entr’ouvre, et que les montagnes ne s’écroulent, de ce qu’ils attribuent un fils au Miséricordieux. Il ne lui sied point d’avoir un fils. »[1] Dans ces paroles on sent l’explosion sincère d’un déisme absolu et aride comme le sable du désert, qui n’admettait aucun partage des perfections divines entre Allah et un être quelconque, même procédant de lui ; ainsi la connaissance, la toute-science, chose essentiellement divine, Jésus n’en a eu que ce qu’en pouvait avoir un simple mortel favorisé de Dieu ; il dit lui-même à Dieu : « Tu sais ce qui est au fond de mon âme, et moi j’ignore ce qui est au fond de la tienne, car toi seul connais les secrets »[2], très-grave parole, négation directe de la doctrine évangélique, mais très-conséquente avec l’ensemble du déisme musulman. Il n’a pas plus la toute-puissance que la toute-science : adorerez-vous à côté de Dieu ce qui n’est capable ni de vous nuire ni de vous être utile, tandis que Dieu entend et sait tout ?[3] Ces passages et quelques autres soulèvent d’avance la fameuse question des attributs divins, qui se combinant avec la philosophie péripatéticienne, sera pendant des siècles le champ de bataille des théologiens et des philosophes musulmans : singulière destinée de l’esprit mahométan de se rencontrer, par suite de ses vastes conquêtes, avec les esprits les plus différents

  1. S. V, v. 19, 76 ; S. XIX, v. 92, 93 ; S. XLIII, v. 81.
  2. S. V, v. 116.
  3. S. V, v. 80.