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D’où a pu venir à Mahomet, nous ne disons pas sa préférence pour cette bizarre négation (car nous verrons qu’il avait un intérêt dogmatique à la soutenir), mais l’idée même de cette négation, qu’il ne pouvait inventer de toutes pièces ? L’origine doit en être gnostique. Les Basilidiens racontaient fort stupidement que Jésus, marchant au supplice, avait transformé Simon de Cyrène en sa propre ressemblance, et ses propres traits en ceux de Simon, après quoi il s’était rendu invisible pour narguer tout à son aise les bourreaux de cet infortuné[1]. Les Cérinthiens disaient déjà qu’un disciple avait pris la place du Maître. Un fragment d’un écrit soi-disant apostolique s’exprime dans le sens des Basilidiens[2]. Quant au prétendu évangile de Saint-Barnabé, il nomme le disciple martyr pour Jésus, et c’est Judas, tout simplement[3]. Mais nous savons que penser de ce document tardif, dont les inventions n’ont aucune valeur, si ce n’est toutefois la créance qu’elles ont obtenue depuis dans le monde musulman.

En effet le théologien déjà cité d’après Mouradgea d’Ohsson, et, comme nous l’avons vu, relativement bien informé, s’exprime ainsi : « Les Juifs corrompus et pervers le persécutent jusqu’à demander sa mort. Trahi par Judas, et près de succomber sous la fureur de ses ennemis, il est enlevé au ciel, et cet apôtre infidèle, transfiguré en la personne de son maître, est pris pour le Messie, et essuie le

  1. Épiphane, l. cit. ch. XXIV : stabat invisibilis Jesus, deridens eos qui Simonem crucifigebant.
  2. Photii Bibliotheca, Berolini 1824, in-4, Cod. 114 ; il y est question d’un livre d’un certain Lucius Carinus, les πεϱίοδοι ἀποστόλων, disant τὸν Χϱιστὸν μὴ σταυϱωϑῆναι, αλλ’ ἑτεϱον αντ’ ἀυτοῦ, ϰαὶ ϰαταγελᾷν διὰ τοῦτο τῶν σταυϱούντων.
  3. Fabricius, Codex apoc. loc. cit.