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DE LA DISTRIBUTION DES RICHESSES.

Un terrain qui ne donne aucun profit peut encore être cultivé, pourvu qu’on y soit dédommagé du capital et de la main-d’œuvre qu’on y consacre. Comme on ne trouve point de fermier pour un semblable terrain, c’est ordinairement son propriétaire qui le cultive. Smith parle de certains mauvais terrains en Écosse qui sont cultivés par leurs propriétaires, et qui ne pourraient l’être par aucun autre. C’est ainsi encore que nous voyons dans les provinces reculées des États-Unis, des terres vastes et fertiles dont les produits ne trouvent point d’acheteurs parce qu’elles ne sont pas encore entourées d’habitans, et qui néanmoins sont cultivées ; mais il faut que le propriétaire les cultive lui-même, c’est-à-dire, qu’il porte le consommateur à l’endroit du produit, et qu’il ajoute au profit de son fonds de terre, qui est peu de chose ou rien, les profits de ses capitaux et de son industrie qui le font vivre avec aisance.

Depuis les premières éditions de ce Traité, M David Ricardo a cru trouver un nouveau fondement au profit des biens-fonds. Il pose en fait que dans les pays neufs et où les terres n’ont point encore de propriétaires, elles ne rapportent que les profits auxquels peuvent prétendre le travail et les capitaux qui les font produire. La concurrence des producteurs empêche en effet qu’ils se fassent rembourser le droit de cultiver la terre, droit qu’ils ne paient à personne. Mais du moment que les progrès de la société rendent nécessaire une quantité de produits plus considérable que celle que peuvent fournir les meilleures terres et les plus avantageusement situées, il faut avoir recours aux terres de moindre qualité ou plus éloignées, et, pour obtenir sur chaque arpent les mêmes produits, faire plus de frais que l’on n’en fait sur les terres premièrement cultivées. Si c’est du blé que l’on cultive, comme la société ne peut avoir la quantité de cette denrée dont elle a besoin, sans payer tous les frais occasionnés par les blés produits sur les moindres terrains, le prix du marché excède les frais de production qu’exigent les premiers terrains, et les proprié-