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DE LA DISTRIBUTION DES RICHESSES.

ble de la société, et que le tant pour cent qu’on paie pour l’usage de cette portion du capital dépend du rapport entre la quantité de capitaux qu’on offre de prêter et la quantité qu’on demande à emprunter, en chaque lieu, sans avoir aucun rapport à la nature de la marchandise, monnaie ou autre, dont on se sert pour transmettre la valeur prêtée.


§ II. — Des Profits des capitaux.


Soit qu’un entrepreneur ait emprunté le capital qui sert à son entreprise, soit qu’il le possède en toute propriété, il en tire, au moment où il vend ses produits, un profit indépendant du profit qui représente le salaire de son talent et de ses travaux. L’intérêt qu’un capitaliste obtient d’un capital prêté est pour nous la preuve qu’on retire un profit d’un capital qu’on fait valoir. Quel entrepreneur, en effet, pourrait, d’une manière suivie, consentir à payer un intérêt, s’il ne trouvait pas dans le prix auquel il vend ses produits, un profit qui l’indemnise tout au moins du loyer que son capital lui coûte ? Et lorsqu’il est propriétaire de son capital, si, en fesant valoir par lui-même ce capital, il n’en tirait rien au-delà du salaire de ses peines, n’est-il pas évident qu’il préférerait le prêter pour en tirer un intérêt, et qu’il louerait séparément ses talens et sa capacité pour en recevoir un salaire[1] ?

Lors donc qu’on veut analyser complétement les faits, il convient de distinguer les profits qu’un entrepreneur retire de son capital, de ce qu’il ne doit qu’à son industrie. Ils sont réels l’un et l’autre dans toute entreprise qui va bien et qui rembourse la totalité des avances qu’elle occasionne ; mais, quoique de nature différente, ils se confondent aisément, ainsi que j’en ai déjà fait la remarque. On rencontre bien des circonstances où il serait cependant utile de les apprécier séparément ; un entrepreneur apprendrait par là quel intérêt il peut, sans imprudence, consentir à payer pour accroître son capital actif ; deux associés, dont l’un fournit plus de capitaux et l’autre plus de travail, sauraient mieux comment régler leurs prétentions respectives.

Une méthode générale de parvenir à une appréciation de ce genre, serait peut-être de comparer la somme moyenne des bénéfices que l’on fait

  1. Si, généralement parlant, le prix des produits indemnise l’entrepreneur des frais qu’il fait pour le loyer de son capital, que dévient le principe de David Ricardo, que le prix des choses ne contient rien qui représente les profits capitaux ?