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LIVRE PREMIER. — CHAPITRE XVII.

un achat, dans une liquidation, la valeur de la monnaie qu’on a employée, on l’a donnée pour ce qu’on l’a reçue, et, l’affaire terminée, on n’en est ni plus pauvre ni plus riche. La perte ou le gain viennent de la valeur relative des deux marchandises vendues et achetées, et non de l’intermédiaire dont on s’est servi.

De toutes manières, les avantages que les particuliers trouvent à recevoir du numéraire préférablement à des marchandises, ne sont rien pour les nations. Lorsqu’une nation n’en a pas la quantité qui lui est nécessaire, sa valeur augmente, et les étrangers comme les nationaux sont intéressés à lui en apporter ; lorsqu’il est surabondant, sa valeur baisse par rapport aux autres marchandises, et il convient de l’envoyer au loin, où il peut procurer des valeurs supérieures à ce qu’il peut procurer dans le pays. Si on le force à rester, on force à garder des matières qui sont à charge à leurs possesseurs[1].

  1. Il n’y a que des personnes tout-à-fait étrangères à ce genre de connaissances qui pourraient objecter ici que l’argent n’est jamais à charge, et qu’on trouve toujours aisément, à s’en débarrasser. Rien n’est plus facile, en effet, lorsqu’on consent à en perdre la valeur, ou du moins à l’échanger avec désavantage. Un confiseur peut de même manger ou donner ses bonbons lorsqu’il ne les vend pas ; mais alors il en perd la valeur. Il est à remarquer que l’abondance du numéraire peut s’allier avec la misère publique ; car c’est avec des produits qu’on achète l’argent nécessaire pour acheter du pain. Dans les circonstances défavorables à la production, on manque d’argent, non pas que l’argent soit plus rare, mais parce qu’on crée avec désavantage les produits qui servent à s’en procurer.